Okéé...
Une histoire dans l'histoire, donc ! Un détour, une digression,
quoi ! Comme un cancer qui phagocyte l'histoire principale !
Externalisons nos divagations ! Et voici donc une sous-histoire qui relate
la rencontre mouvementée d'un renard, d'un facteur à vélo et d'un certain
Monsieur Pinchon !
Une balade à la campagne ou à travers bois, sur une piste de
brousse, une allée forestière ou un chemin bordé d'arbres et de haies. Et
l'occasion aussi de rouler des joints à mes lecteurs et de les faire
planer... de les distraire, de les embrouiller, de les enfumer, de
les embrumer, de les mystifier et de leur donner le tournis... de
jeter des mots saigneux et toxiques dans les broussailles et les fourrés pour
escagasser, entortiller, circonvenir, élucubrer, dévoyer ou chausse-trapper les
agents spéciaux A.Z. et P.K. qui cherchent toujours à me prendre en filature...
de leur tendre une embuscade, de les flasher et de leur lancer des pétards dans
les jambes, de les éblouir et de les assourdir, de les aveugler et de les
étourdir, de les terroriser... ou de parvenir à les semer, de trouver une
ouverture, de forcer une échappée et d'abandonner mes lecteurs et mes
poursuivants en pleine forêt..
Une balade zinneke, mixte et métissée, dans un village bordant la
forêt sombre de l’Ardenne ou la forêt claire du Kwilu, à Kiko ou dans
les bois du hameau des Boucs qui bordent les routes de Jemelle, de Nassogne, de
Masi-Manimba ou de Harsin... Comme chacun voudra !, au Royaume de
Jupiler ou en République autocratique du Luabongo... Comme chacun l'entendra !,
ou encore du côté de Todomé, en République d'Awoyo, dans la savane giboyeuse et
boisée du canton de Djaba.
Une ballade fantaisiste et imaginaire menant là où des lecteurs
"aventureux" n'ont pas l'habitude de se promener, là où de
prétendus "découvreurs de la nature" ne peuvent plus se référer
aux arbres balafrés de balises rouges et blanches par les gardes forestiers,
aux sacs de détritus et autres bornes olfactives (et petits tas de PQ) déposés
au pied des feuillus par leurs prédécesseurs ou aux repères culturels
installés par les préposés de la culture dite
"mondialisée" au bénéfice des insectes ravageurs du tourisme dit
"international"
Une balade allégorique en trois phases ou trois mouvements.
Okéé...
Il m'a cependant été rapporté que des gens "normaux" souhaiteraient que j'écrive désormais des histoires "normales" ! Et qu’ils se montreraient particulièrement insistants sur ce point !
Unité de temps, de lieu... et de quoi encore ?
Ça me pose un sacré problème ! Une histoire normale (ou une
sous-histoire, c'est pareil) peut-elle trouver sa place dans mon roman qui se
veut onirique, gouailleur, burlesque et extravagant ?
Par ailleurs, je ne sais même pas ce que c'est, une histoire normale, ni
comment ça s'écrit !
Ni quelles sont les normes, les règles et les principes d'une bonne écriture
!
Ni ni ni ni quels sont les clefs et les codes, les sauces et les épices
qu’utilisent les hommes de l’art, les trucs et les astuces qui font le
bonheur des faiseurs de livres en tous genres (à n'importe quel prix, dans
n'importe quelle langue, sur n'importe quel sujet, de n'importe quelle manière,
pour n'importe quel public, en vue de n'importe quel effet) !
Et je me demande qui sont ces gens normaux ? Et s'il est normal d'être
normal et si ça ne cache pas quelque chose d'anormal ? Quels orgueils,
préjugés, jalousies, rancoeurs, rackets, lâchetés, indignités et perversités
cette normalité ne dissimule-t-elle pas ? Quelles angoisses, détresses, abcès
buccaux, lupus, pelades, infirmités ou fragilités ? Quelle étoile
d'anis, quel tampax, sparadrap ou dentier embusqué dans un gâteau des
Rois ? Quels sous-vêtements fluos ? Quelle intolérance au gluten ? Quels
boutons d'acné sur les fesses ou quelle démence neurodégénérative évolutive et
irréversible ?
Et je me demande aussi pour quelles raisons, ils veulent qu'on leur
raconte des histoires normales, ces gens normaux-là ? En vue de quel
effet ?
Mais qu'ils aillent donc se faire foutre !
Et schtonk dans leur derrière !
Okéé...
Pourquoi, en effet, devrais-je me casser le cul à concocter des intrigues
astucieuses (mais truquées) et organiser des jeux de piste pleins de suspense
(mais sécurisés) pour gens normaux ? Avec exploration en profondeur d'émotions
préfabriquées et retournements de situation spectaculaires (mais généralement
inodores, incolores et tout à fait inoffensifs) ? Me faudrait-il aussi teinter
en vert pomme, en rose fluo ou en bleu électrique les cheveux de mes
personnages (pour permettre à des lecteurs-consommateurs de mieux les
distinguer les uns des autres, sans trop se poser de questions) et les faire
évoluer dans des paysages de synthèse, toujours ensoleillés, constamment
balayés par des caméras de videosurveillance et gardés par des vigiles armés ?
Pour écrire, je n'ai pas besoin d'eux !
En effet, je n'écris pour personne d'autre que pour ma petite chérie, Ana (alias « No me
digas », alias « Increïble », alias « Ata yo
moko », alias « Eza somo » ou « Eza na
tina te »), ma femme mariée...
- Hola caracola ! Hola querida ! Toujours sceptique et suspicieuse, petite
chérie ?
- A juste titre, Douchka, non ?
- A juste titre, Douchka, non ?
- C'est comment, petite chérie ? Confiance ezali lisusu te, oh ?
- Faute ya yo moko, eh !
qui m'écoute parfois (avec prudence ou exaspération et jamais trop
longtemps) débloquer ou divaguer, m'aide souvent à retrouver des noms communs
rares ou des noms propres oubliés, pousse quelques soupirs d'exaspération... Tu
me harcèles comme une mouche qui veut qu'on lui ouvre la fenêtre !,
gloussements d'indignation ou exclamations de RIIIR mais ne se donne jamais
vraiment... Je te connais trop bien, Douchka ! Nayebi yo malamu ! Ozali kizengi
trop ! Et je sais déjà que tes histoires seront vaseuses et
qu'elles vont m'énerver !, la peine de me lire à fond et qui prend plutôt
plaisir à m'interrompre, à me contredire et à me contrarier et qui me regarde
alors avec des yeux non pas de biche attendrie mais (passant d'un regard à
l'autre) de prédatrice irritée et m'envoie valser dans les ronces, les orties,
les chardons, les cactus et les agaves ou dans une haie d'épineux, un bosquet
de houx, une couronne d'épines d'acacias et un rouleau de barbelés et qui me
balance, à l'emporte-pièce, des commentaires en lingala ou en espagnol (voire
en catalan de la Comunitat Valenciana) : "Eh ! Ce sont mes langues
de résistance à l'oppresseur, dit-elle ! Non réductrices à ton français
tout-frais-chié ! Non réductrices au chinois de l'avenue du Commerce et de
l'Industrie ou à l’anglo-dutch-américain-allemand des bourses de Londres et de
New York, de la Banque mondiale, de l'Union européenne et du FMI ! Je me
protège, quoi ! Et je me ménage ainsi, explique-t-elle encore, quelques espaces
de pensée et de culture autonomes !".
J'écris pour elle et elle ne me lit jamais. C'est finalement très reposant.
Mais je l'adore, ma femme mariée, ma tomate verte de Valencia qui
murit et rougit de l'intérieur, à partir du coeur... Ana, mon
emmerdeuse, mon origine de la vie et ma fin du monde, mon pancréas
et... Tu ne pourrais pas être un peu plus sympa, Douchka
?, ma vésicule biliaire, mon être humain, mon éminence
grise et mon âme damnée, ma belle brocante, ma décoiffée, mon Aliénor
d'Aquitaine aux cheveux libérés... faudrait surtout pas croire !
Okéé...
Trois phases ou trois mouvements (ou plus) annonçais-je, parce que je
n'aime pas conduire d'éventuels lecteurs sur des autoroutes
balisées, à sens unique et à destination prévisible, sans pièges à
éléphants ni risques à assumer.
Et parce que les histoires trop bien agencées, trop bien
ficelées, sans sortie de secours ou possibilité de fuite pour les lecteurs et
pour l'auteur lui-même (renoncer à RIIIR ou à écrire, s'évader en montgolfière
pour échapper à la guillottine, se retirer avant d'éjaculer, faire demi-tour,
perdre carrément le fil de son histoire, passer subrepticement du virus à la
bactérie, du marché de la place Flagey à celui de Noépé ou de Yolo Ezo, rendre
son tablier, remettre tout à plat, se faire couper les cheveux par une nuit de
pleine lune, s'enfuir par un soupirail, une lucarne, un hublot ou la fenêtre
des toilettes, reprendre sa mise ou ses billes et se barrer vite fait, repartir
de zéro, ouvrir un autre front) me font gerber.
Contrairement à mon pote Odyssée (cet pote-là, j'en ai déjà parlé mais je
le présenterai plus en détail par après, dans une autre séquence de la Sosecra,
un séquence encore à retrouver et à restaurer) qui s'invente des
aventures avec une facilité déconcertante et... Pour un bol de soupe
et des oeufs durs !, n'éprouve aucune gêne à raconter des carabistouilles aux
professionnels ou aux amateurs de la compassion et à balancer toutes sortes de
craques aux corps habillés qui l’interpellent... tandis que moi, je pédale, je
patine, je souque, je patauge dans la merde et le poto-poto, je ruissele.
Moi, à chaque histoire, je dois trouver les mots qui lui conviennent
et le style et le tempo qui "vont avec". Et c'est parfois très
compliqué.
Ndlr : Vous êtes encore perdu(e)s ?
Et vous vous demandez où trouver un plan de la ville, un menu de la semaine ou une table des matières quelconque… et comment avoir accès à chacune des différentes séries de séquences du buku « sorciers, services et crapuleux » ?
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